Cela fait un peu plus de 13 ans que je travaille dans une entreprise au sein de laquelle j’ai occupé différents postes.
Pour sortir de ma zone de confort, j’ai décidé de me lancer dans une nouvelle aventure : changer de structure. J’ai donc postulé à des annonces qui présentaient des profils aux compétences rares et recherchées.
J’ai autrefois passé des entretiens sans avoir le niveau de conscience que j’ai actuellement. Je suis une femme engagée. Mes combats portent sur la justice sociale, l’inclusion. Des combats que j’incarne au quotidien en donnant la chance à des jeunes de milieux défavorisés : se former auprès de moi en cybersécurité. Je m’engage pleinement et totalement à les former afin qu’ils soient compétitifs sur le marché du travail. En France J’ai été la figure de proue du combat des personnes noires pour l’accès aux soins de la procréation médicale assistée : Une PMA (Procréation Médicalement Assistée) pour tous et toutes et une GPA (Gestation Pour Autrui) pour les hommes cis-genre, transgenres seuls et homosexuels. Je continue de me battre pour une justice reproductive. En passant mes entretiens j’ai réalisé qu’il y avait aussi tout un chantier à investir en Europe dans le processus de recrutement. Investir plus d’équité dans le processus de recrutement.
Je passe des entretiens et je fais le constat qu’au sein des équipes de recrutement figurent très peu de personnes appartenant aux groupes minoritaires de la société auxquels je m’identifie. Toutes ces personnes apporteront certainement des perspectives nouvelles en matière de recrutement. Actuellement les personnes en charge de recruter sont si familières de leurs procédures qu’elles en viennent à adopter une attitude qui au lieu d’inclure, exclut. Il importe de s’éduquer sur la question de l’inclusion. Il importe également de reconnaître le risque que différents biais parasitent le processus de recrutement, et ce en la défaveur de la personne qui postule et qui appartient à un groupe minoritaire de la société. Il convient alors que le recruteur ou la recruteuse, au préalable, se prépare, de façon à adresser des questions qui tiennent comptent de la diversité des profils des candidats et des candidates.
Quelques exemples de diversité sur le lieu de travail :
- Diversité culturelle
- Diversité raciale
- Diversité de l’âge
- Diversité de genre
- Orientation sexuelle
- Handicap visible et non visible
Un candidat qui jouit d’un certain capital économique ou culturel, et qui de surcroît peut se former en permanence est une personne privilégiée. Il dispose par conséquent de plus de temps qu’une personne qui ne jouit pas des mêmes privilèges. Une personne noire européenne par exemple fait face à de nombreuses discriminations (logement, emploi, santé…). Toutes ces discriminations sont autant d’obstacles au quotidien. Obstacles auxquels elle est confrontée et qui mobilise et disperse son énergie.
Une entreprise qui se veut inclusive doit tenir compte de toutes ces problématiques sociétales. Ses méthodes de recrutement doivent alors être tant innovantes que cohérentes. Lorsqu’une entreprise affiche l’inclusion ou encore la promotion des minorités comme valeurs, pourquoi ne choisirait-elle pas les engagements civiques ou citoyens d’un candidate, d’une candidate, comme le premier critère de sélection du profil ?
Ma méthode inclusive d’entretien.
J’ai pu constater que bon nombre de recruteurs ne se renseignent pas suffisamment sur les candidats, les candidates. Or le CV contient des informations pertinentes sur lesquelles il convient de s’attarder (projets Github, publications Medium, travaux publiés sur site Internet). En fonction des informations collectées, je pose des questions en lien avec les attentes du poste. Je vais également adresser au candidat ou à la candidate des questions relatives aux travaux qu’il, qu’elle aura publiés. Par ailleurs trois jours avant l’entretien, j’adresse toujours aux candidats et aux candidates des questions techniques à résoudre. Selon les réponses de chacun.e, je saurai quel.le candidat.e est le plus ou la plus pertinente dans sa démarche de recherche d’un emploi.
Je n’attends pas d’un.e candidat.e qu’il ou qu’elle possède une excellente maîtrise des compétences. J’attends de chacun.e qu’il ou qu’elle construise une réflexion pertinente pour résoudre le problème énoncé. Voici une liste de questions qui m’ont été posées en entretien. J’ai quelque peu du mal à en appréhender tant le sens que la portée.
Des questions souvent posées et pas toujours à-propos :
- Comment vous voyez dans 5 ans ?
- L’échelle de temps d’une personne privilégiée n’est pas la même qu’une personne non privilégiée. Celle-ci fait face à de nombreuses contingences matérielles et financières qui très souvent l’empêchent de se projeter aussi loin dans le temps.
- Que ferez-vous en cas de conflit en tant que manager ?
- Une personne racisée a très souvent conscience du fait que le système ne la protège pas. Elle s’en réfèrera très souvent aux instances, donnant le sentiment de ne pas être autonome, ou encore peureuse.
- Quelle serait votre réaction si une promotion vous est refusée ?
- Toute personne serait évidemment déçue. Question que j’appréhende mal car je ne cerne pas l’intention de mon interlocuteur ou encore de mon interlocutrice. Répondre mobilise davantage de réflexion chez une personne appartenant à un groupe minoritaire. On parle de charge mentale et plus spécifiquement de charge raciale lorsque c’est une personne racisée qui engage la réflexion.
- Quels sont les éléments à votre disposition pour évoluer et monter en compétences sur les sujets sur lesquels vous avez des lacunes ?
- Les personnes minoritaires disposent très souvent de peu de ressources. Un recruteur ou une recruteuse serait-il, serait-elle prêt.e à entendre cela ? Une réponse honnête ne renforcerait-elle pas au final les biais négatifs ou encore tout autre préjugé négatif du recruteur ou de la recruteuse à l’endroit du candidat, de la candidate ?
Des réponses politiquement incorrectes à une question peu à-propos :
- Qu’attendez-vous d’une entreprise ?
- Une diversité, une inclusion, qui intègre les problématiques des personnes minoritaires sur leur lieu de travail.
- Une entreprise qui fasse progresser et grandir la société sur le plan de l’inclusion.
- Une communication claire et honnête entre managers et collaborateurs sur les questions d’inclusion et d’ouverture aux groupes minoritaires de la société.
- La capacité des managers à entendre les questions d’inclusion et d’ouverture aux groupes minoritaires de la société, et à s’ouvrir à ceux-ci.